1968/1989: Paris - Prague

Colloque philosophique “1968 – 1989: PARIS – PRAGUE”

le 14 novembre 2017
Institut francais de Prague (5e étage), Štěpánská 644/35, Prague 1, 111 21

Intervenants: Jacques Rancière, James Krapfl, Vincent Jacques, Patrice Maniglier, Katarzyna Bielinska, Ivan Landa, Jana Berankova, Nick Nesbitt, Michael Hauser, Joe Grim Feinberg

1968/1989 all video recordings

Jacques Rancière: Politique de la fiction (conférence)

le 15 novembre 2017 (reporté au 7 février 2018)
La Galerie Nationale à Prague (Veletrzni palac), Dukelských hrdinů 47, Prague 7, 170 00

Sur une affiche anonyme distribuée pendant la « Révolution de velours » de 1989 étaient imprimées deux chiffres : 89 et 68. Ces deux chiffres symbolisaient deux grands soulèvements populaires en Tchécoslovaquie ainsi que deux promesses des formes alternatives du socialisme. L’affiche était conçue afin d’être lue de deux côtés : le chiffre 89 pouvait être renversé et lu comme 68 comme si l’automne 89 n’était qu’une inversion du printemps 68. 1989 promit d’être un nouveau 1968 à plus de succès.

1968 fût caractérisée par sa nature transnationale—des soulèvements ont eu lieu en Mexique, aux États-Unis, en Chine, au Brésil, et au Sénégal. En Europe, les deux moments les plus symboliquement intenses étaient le Mai 68 français et le Printemps de Prague tchécoslovaque. Chacun de ces moments avait ses propres espoirs et son propre rapport avec le pouvoir de l’état : d’un côté (en France) une opposition claire au pouvoir de l’état, de l’autre (en Tchécoslovaquie) un effort concerté pour créer un nouveau dialogue entre le pouvoir de l’état et le peuple.

Les « événements de 1968 » furent un moment paradigmatique pour toute une génération des philosophes. Philosophie refléta ces moments dans la construction d’une série de nouveaux concepts. Les mots comme « l’évènement » et « l’égalité » prirent une place importante dans le vocabulaire philosophique renouvelé. Des penseurs tels que Jacques Rancière dirigèrent leur attention vers la partie surnuméraire de chaque situation et soulignèrent le fait que les luttes pour l’égalité sont une question centrale de la politique.

Avec la réélection du général de Gaulle en 1968 et l’arrivée des troupes du Pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie, les espoirs d’un nouvel ordre social réveillés par ces deux mouvements s’estompèrent progressivement. Une partie de ces espoirs resurgit pendant la « Révolution de velours » de 1989 où ses participants revendiquèrent une vraie démocratie ouvrière et un socialisme renouvelé. Or, une privatisation rapide des biens d’état et la libéralisation du marché pendant les années 90 transformèrent le sens philosophique de 1989 en un procès négatif, un point marquant supposé de signaler la fin d’une séquence historique dite « communiste ». 1989 devint une date symbolisant pour certains, la culmination des procès historiques fixes et la fin de l’histoire, pour les autres, qui se remémorèrent des espoirs réprimés, cette date symbolisa une catastrophe étrange et incompréhensible.

Dans le moment actuel où l’absence de la politique émancipatoire ouvre une vanne à des formes renouvelées de xénophobie et de nationalisme, il nous semble important de repenser le 1989 à la lumière de 1968. Quels aspects affirmatifs de ces deux événements furent oubliés ? Comment cette séquence historique pouvait-elle mener à l’effondrement du Deuxième Monde ? Quelles étaient les inventions philosophiques présentes dans ces deux événements ? Quels concepts furent initiés par eux ? Et comment les visions du Mai 68 français différent de celles du Printemps de Prague ?

Le but du colloque « 1968-1989 : Paris-Prague » est de penser l’histoire à la lumière de la philosophie, de penser la philosophie dans son historicité et de questionner l’émergence des concepts philosophiques et des vérités lors des évènements historiques. Ce colloque réunira des historiens et des philosophes majeurs qui questionnent ces dates et leur signification philosophique. Il assemblera des chercheurs qui travaillent sur l’héritage de la pensée marxiste de l’Europe Centrale et du 1968 dans la philosophie continentale. Le colloque sera lié à la première conférence du philosophe français Jacques Rancière à Prague. Jacques Rancière fera une conférence à la Galerie Nationale à Prague ainsi qu’une conférence dans le cadre du colloque lui-même.